Rapatriement après la mort : qui est pour ?
|Il y a quelques semaines, à l’enterrement d’un ami malgache, dans une petite ville française de province, je n’ai pu m’empêcher de m’interroger : « Pourquoi ne l’enterre-t-on pas au pays, sous la terre et le ciel de ses ancêtres ? » Depuis, cette question ne m’ayant pas quitté, j’ai poursuivi ma réflexion et fait quelques recherches sur le rapatriement des défunts. Je vous en soumets les résultats ici, dans la rubrique Débats.

Une couronne mortuaire déposée sur un tombeau malgache (photo MCF)
Ce jour-là, il faisait froid, le ciel était bas, les nuages étaient gris, et pour compléter le tableau, il pleuvait averse. En somme, tout nous rappelait combien nous étions loin, très loin de Madagascar. Seul le drapeau tricolore rouge, vert et blanc étendu sur le cercueil, nous ramenait aux origines du défunt. Pourtant, celui que nous enterrions était tout ce qu’il y avait de plus malagasy. Il portait même fièrement ses couleurs jusqu’à en customiser son van. Alors pourquoi lui dire au revoir dans ce petit cimetière, si loin de ses proches morts avant lui ?
Si différent des enterrements malgaches
Alors même que j’assistais tristement à cette cérémonie, d’autres images, plus anciennes celles-là, me revenaient en mémoire : celles d’enterrements auxquels j’avais assisté à Madagascar. Je me rappelais ces veillées funèbres interminables où défilaient les gens par centaines dans la maison du mort ; de ces chants ininterrompus entonnés si forts qu’ils pouvaient tenir éveillé tout un quartier pendant vingt-quatre heures ; de ces immenses cortèges hétéroclites et colorés sillonnant la montagne pour porter le mort jusqu’à son tombeau. Je me suis alors répété « Pourquoi n’a-t-il pas droit à cela ? »
La mort de cet ami était aussi soudaine qu’inattendue. Je n’avais jamais eu l’occasion d’aborder ce sujet avec lui et je ne crois pas qu’il ait eu le temps d’envisager ses obsèques. En tout cas, visiblement, il n’avait pas fait le choix de souscrire à une assurance rapatriement de corps.
J’ai cherché à savoir s’il y avait beaucoup de malgaches dans son cas (immigré en France et enterré en France). Je n’ai pas trouvé de chiffres spécifiques aux malgaches, mais je suis malgré tout tombé sur une étude très intéressante consacrée au « lieu d’enterrement des personnes nées hors de France ».
Le profil type du pro rapatriement
Cette enquête, menée au début des années 2000, nous permet notamment d’établir le profil type de l’immigré vivant en France mais faisant le vœu d’être enterré dans son pays d’origine.
♦ C’est un homme (37,5% des hommes souhaitent un enterrement dans leur pays d’origine contre 31,4% des femmes).
♦ Il n’habite pas en France depuis longtemps (plus on est en France depuis longtemps, moins on envisage un rapatriement de son corps).
♦ Il est chrétien (les musulmans ont davantage tendance à vouloir passer leur mort dans leur pays de naissance).
♦ Il est marié (les veufs, célibataires ou divorcés, eux, sont plus nombreux à désirer un rapatriement).
♦ Il a été plus longtemps scolarisé que les autres (ceux qui ont fait moins d’études privilégient davantage l’idée d’un enterrement au pays).
♦ Il est propriétaire de sa maison (le fait qu’il ait acheté signifiant probablement un sentiment d’appartenance plus grand à la France).
♦ Il ne retourne pas très fréquemment dans son pays d’origine (que ce soit pour des vacances ou autre).
♦ Il a des enfants en France.
♦ Enfin, il s’est installé en France pour des raisons familiales (ceux qui y sont pour des raisons professionnelles sont plus nombreux à envisager un rapatriement).
♦ Au final, tous critères confondus, les immigrés vivant en France ne sont que 34,6% à souhaiter un enterrement dans leurs pays d’origine.
Attention, il ne s’agit là que de statistiques. Autrement dit, ces chiffres ne préjugent pas des choix de chacun. La réflexion autour de la mort ne pouvant être limitée à des critères socio-économiques ou même religieux. Chacun ayant une réflexion intime et personnelle sur le sujet.
Pour connaître les chiffres complets et l’analyse accompagnant cette enquête, je vous invite à consulter l’étude dans son contexte. Le document est en ligne ici.
Et vous ? Vous êtes-vous déjà interrogé sur cette question ? Avez-vous pris des dispositions particulières ?